Ian Malcolm et la Lune...

Comme je l'ai dit au début de l'article précédent, j'ai entrepris de relire les saintes écritures de Jurassic Park, le diptyque Le Parc Jurassique (1990)/Le Monde Perdu (1995) de Michael Crichton. 

Pour une fois, je vais assez vite dans ma lecture puisque j'en suis à la page 400 en moins d'une semaine.

Et une remarque de Ian Malcolm dont je ne me souvenais plus m'a interpelée (si je puis dire).


Note : ce que je vais dire n'est bien évidemment pas une critique du livre ou de Michael Crichton. J'apporte juste un petit complément de nuance sur la réplique de Malcolm. 

Cela étant, naturellement, et tout le monde l'aura compris, quand je parle de Jurassic Park et The Lost World comme étant les "saintes écritures", c'est une exagération portée par la passion et l'affection que je porte à ces deux livres depuis mon enfance mais j'admets volontiers qu'ils ne sont pas parfaits et c'est bien normal. C'est pour cela que pour autant que je les adore et que je pourrais les relire encore et encore jusqu'à la fin des temps, il y a quelques petites choses dans ce que dit Malcolm (et par voie de conséquence Crichton) avec lesquelles je suis un peu en désaccord. 

Pour ce coup-ci, je ne vais cependant pas m'étendre sur le fond de ce que dit Malcolm dans le passage du Parc Jurassique qui nous intéresse aujourd'hui et me contenterai seulement de nuancer une petite chose dans la tirade du mathématicien. 

Cette mise au point étant faite, passons au sujet du jour. 

Alors que je terminais ma lecture avant-hier soir avant de me laisser tomber dans les bras de Morphée, j'en arrivais au moment où Malcolm, gravement blessé après l'attaque du Tyrannosaurus rex, est soigné par Ellie et Harding dans le pavillon du parc. Bien qu'en sale état, le mathématicien expose alors son opinion sur les travers des scientifiques, qui, selon lui, sont une sorte d'égoïstes inconscients mus par l'ambition d'être les premiers sur tous les sujets et de détruire la nature pour imposer la toute puissance d'une science qui se prend pour Dieu. 


Très honnêtement, si l'on peut comprendre ce point de vue, je le trouve, pour ma part, extrêmement exagéré et très injuste contre les scientifiques.

A ce compte-là, TOUT est nul et inconscient, et on entreprendrait jamais rien sur cette planète.

Surtout, il y a, et ce n'est que mon avis, un amalgame entre diverses factions des milieux scientifiques. Que certains groupes veuillent absolument être les premiers à faire une chose pour marquer l'Histoire dans un trip prométhéen, oui, ça existe, on ne va pas se le cacher. Mais la science, ce n'est pas que ça et beaucoup de scientifiques font leurs travaux dans leur coin sans essayer de se prendre pour quoi que ce soit. Ils cherchent à comprendre ce qu'il se passe dans la nature autour d'eux, qu'elle soit à coté de chez eux, sur la Terre ou dans l'espace, et c'est tout. Et de temps en temps, ça implique de devoir se résoudre à se donner de gros moyens et à "abimer" les choses. Mais ce n'est qu'un dommage collatéral dans ce cas, pas une volonté de détruire pour montrer à la nature qui est le patron et qui a la plus grosse volonté à se croire l'esprit le plus évolué que la planète ait connue. 

Et de temps en temps donc ça amène à ce qu'il y ait une course entre scientifiques de bonne volonté et que l'un d'eux soit sur un sujet donné le premier. 

Ce que dit Malcolm qui englobe TOUTE la communauté scientifique, c'est un peu comme mettre dans le même sac les planétologues qui explorent le Système solaire et les plans colonisateurs d'Elon Musk. Les deux n'ont pourtant STRICTEMENT rien à voir : les premiers font VRAIMENT avancer la connaissance et la compréhension de la nature alors que le second ambitionne de violer la nature à des fins vides de sens (ce n'est pas comme ça qu'il le présente évidemment mais c'est à ça que ça revient). 

Le John Hammond du roman, comme celui du film, est finalement une sorte d'Elon Musk de la génétique : il a fait son projet sans but scientifique - ce qu'il revendique lui-même d'ailleurs - et pour son business. Il ne se pose pas de questions sur le sens éthique de ce qu'il fait et des problèmes que cela pourrait causer. Hammond, comme Musk, est porté par une vision mais sa vision est biaisée et sort du cadre de la plus ancienne quête de l'Humanité, la seule qui vaille : la quête de la connaissance et de la compréhension. 

La science, c'est oui. Son utilisation par John Hammond et Elon Musk, c'est non.

Bon, vous me direz, personne autour de Malcolm, y compris Ellie et Harding, ne prend au sérieux ce qu'il dit. Il est à ce moment-là sous morphine pour supporter la douleur de ses blessures et Harding met sa tirade sur le compte d'un délire. 

C'est peut-être une explication au fait que ce que dit le mathématicien soit très exagéré. 


Enfin bref, pour en revenir à ce qui m'a fait réagir, c'est une phrase de Malcolm dans le flot de sa réplique : 

"Les astronautes abandonnent des détritus sur la Lune."

En tant que passionné d'exploration humaine de notre bon vieux satellite, je dois dire que cette phrase m'a un peu fait mal en la lisant 😅 ! 

Et là encore, je trouve que l'accusation de Malcolm (et donc Crichton) est en partie injuste et exagérée. Du moins pour ce qu'il en est à l'heure où j'écris ces lignes. 

Déjà, replaçons juste une nuance chronologique sur les astronautes qui abandonnent - au présent donc - des "détritus" sur la Lune.  

Il faut se rappeler qu'il y a eu que six missions humaines sur notre satellite, la dernière, Apollo 17, ayant eu lieu en décembre 1972. Ce qui veut dire qu'au moment des événements du Parc Jurassique, en août 1989, cela faisait en fait déjà plus de quinze ans que plus aucun astronaute n'avait mis les pieds sur la Lune. 

Donc cela faisait quinze ans que la "pollution" des astronautes sur la Lune s'élevait à zéro. 

Et presque autant pour ce que Malcolm pourrait qualifier aussi de "détritus", à savoir les sondes automatiques, puisque la dernière sonde à cette date d'août 1989 était l'engin soviétique Luna 24 qui s'est posé sur l'astre en 1976. Ensuite plus rien pendant longtemps. Les Etats-Unis ne renverront une sonde, Clementine, qu'en 1994, soit vingt-deux après leur dernière exploration avec les missions humaines Apollo 16 et 17. D'ailleurs en 2021, ni les Etats-Unis ni la Russie ne se sont reposés sur la Lune, que ce soit avec des sondes ou avec des Hommes, depuis près de cinquante ans. 

Si l'Histoire s'était passée comme elle aurait dû, la présence humaine sur la Lune n'aurait, de toute façon, pas été tellement plus longue (elle se serait arrêtée probablement mi-1974 au lieu de fin 1972). Mais ce ne fut finalement pas le cas hélas puisque, comme je l'ai déjà mentionné dans d'autres articles sur le blog (ici, , re-ici et re-là), les trois (!) dernières missions sur la Lune prévues qu'étaient Apollo 18, Apollo 19 et Apollo 20 furent malheureusement annulées dès 1970 (et je ne vais pas en dire plus sur le sujet pour ne pas dire de gros mots). 

Il faut aussi se rappeler que les "détritus" étaient réduits au strict nécessaire, en raison du fait que les plus longs séjours lunaires (Apollo 15, Apollo 16 et Apollo 17) n'excédaient pas trois jours seulement sur notre satellite. C'est peu pour faire une pollution significative, d'autant plus que cela ne concernait à chaque mission que deux personnes uniquement*. 


Au total, les douze astronautes laissèrent quelques dizaines de tonnes de "détritus" derrière eux à la surface de la Lune. Bon, dit comme ça, ça semble beaucoup. Mais c'est en fait pas si élevé que ça en considérant les restrictions qu'il y avait à l'époque. Pour aller sur la Lune, y vivre quelques jours, mener à bien les expériences scientifiques et faire l'exploration, on ne pouvait pas tellement faire moins que ça.

Et puis, il ne faut pas s'imaginer une décharge à ciel ouvert. Les choses laissées se trouvent réparties en six endroits différents et sur un petit périmètre. Ce n'est pas une pollution à grande échelle de la Lune. 

Il y a également une distinction à faire dans ce qu'on appelle des "détritus". Pour moi, les "détritus" sont les objets et restes qui n'avaient pas de réelle utilité et je distingue donc cela du matériel scientifique laissé sur place. Par exemple, les trois LRV (les jeeps lunaires) et les ALSEP ne sont, à mes yeux, pas des déchets, ce sont des outils d'exploration et d'étude de la Lune. 

La station scientifique ALSEP d'Apollo 16.

Plan de l'ALSEP qui devait être déposée sur la Lune par Apollo 13.

John Young et le LRV d'Apollo 16.

Idem pour les autres instruments scientifiques qui étaient là pour faire de la science dans son noble sens : le réflecteur laser d'Apollo 11, le sismomètre d'Apollo 12, etc. 

Pour l'anecdote, il y a même eu parfois des cas presque expérimentaux : la mission Apollo 17 déposa un engin destiné à capter des ondes gravitationnelles, plus de quarante ans avant la première détection réussie de celles-ci (bon, l'appareil était en fait nettement moins puissant que ce qu'il aurait fallu mais on ne le savait pas à l'époque). 

Reste le cas un peu plus ambigu des témoignages personnels laissés par les astronautes sur la Lune, comme la photo de la famille de Charlie Duke, les balles de golf d'Alan Shepard (dont on a parlé ici il n'y a pas longtemps) ou encore de la plaque commémorative aux morts de l'exploration spatiale. 


Bon, là, Ok, on peut commencer à assimiler un peu ça à de la pollution, bien que l'on puisse nuancer cette qualification : pour la plaque commémorative, son aspect hautement symbolique en fait bien plus un mémorial comme les monuments aux morts que nous trouvons dans nos villes qu'un déchet. 

En terme de "détritus" purs, il faut bien dire qu'il y en avait forcément un peu : les morceaux cassés par les astronautes (comme le garde-boue du rover d'Apollo 17), les restes des boulons explosifs et aussi les sacs à excréments, pour ne prendre que les choses les plus évidentes. Notons d'ailleurs sur ça qu'une chose pourrait partiellement donner raison à Malcolm et Crichton, à savoir la première photo prise par Neil Armstrong à la surface de la Lune qui montre... un sac poubelle. Parce que lorsque les astronautes de chacune des missions ouvraient la trappe du module lunaire, ils commençaient par jeter tout ce qui les encombrait dans le petit habitacle du LM. Donc le sac poubelle contenant leurs déchets. Là, il était tombé en bas de l'échelle et roula un peu sur le sol. Armstrong voulut prendre un panorama du site et commença sur sa gauche. Et dans son champ, il y avait certes le pied du module mais aussi le sac poubelle. Pas de bol. 

Mais tout ça pour dire que ce qu'on a laissé sur la Lune n'est pas que des détritus et que ce n'est pas intrinsèquement lié aux scientifiques. 

Pour preuve, même si on va encore probablement tâtonner un peu du fait des contraintes techniques et budgétaires, l'objectif est déjà donné pour le retour des astronautes sur la Lune dans quelques années d'avoir le moins d'impact possible sur l'environnement de notre satellite. Donc de réduire au maximum la pollution éventuelle laissée à la surface de la Lune, surtout dans le cas des missions qui auront plus d'astronautes (quatre au lieu de deux) et qui resteront plus longtemps (d'une semaine à un mois au lieu de trois jours maximum).

Vous voyez, messieurs Malcolm et Crichton, les scientifiques ne polluent pas par ego ou par inconscience mais en plus il leur arrive de retenir les leçons du passé 😜 ! 


Là, on l'on peut craindre une pollution massive de la Lune, c'est par contre en ce qui concerne l'exploitation commerciale des ressources de l'astre. Et là, c'est un problème. 

Contrairement à ce que l'on croit souvent, l'exploration spatiale et l'écologie ne sont pas antinomiques. Bien au contraire : les considérations écologiques acquises de ce qu'il se passe sur la Terre doivent nous permettre de faire une exploration scientifique humaine la plus respectueuse possible sur la Lune mais les technologies et moyens développés sur la Lune pour ne pas polluer à outrance auront des retombées technologiques sur la façon de concevoir des systèmes moins polluants sur la Terre. 

C'est pour ça que, personnellement, je suis déjà CONTRE les idées que les Etats-Unis veulent vendre à nombre de leurs partenaires concernant une future exploitation des richesses de la Lune à des fins de profits et d'entreprises, ce qui semble se dessiner derrière les Accords Artémis, lesquels envisagent déjà une utilisation des ressources lunaires. Si cela peut s'entendre dans une certaine mesure (pour des missions de longues durées voire carrément une base éventuelle), c'est une optique un peu ambiguë quand on se rappelle que Barack Obama puis Donald Trump ont décidé d'accorder aux entreprises américaines la possibilité d'extraire des ressources pour en faire le commerce. Tout doucement, on ouvre donc la voie au minage de la Lune. Des pays ont déjà accepté ces Accords Artémis pour enraciner le plus possible leur participation au programme de la NASA mais la France ne les a pas encore signés. Et j'espère bien que la France ne le fera pas - du moins pour ce qui est de la partie concernant l'utilisation des ressources - car j'ai l'impression qu'on ouvre avec ça une boîte de Pandore qui souillera notre voisine mais aussi décrédibiliserait au passage la transition écologique de notre pays (on ne peut pas tenter de s'adapter à un mode de fonctionnement écologique sur la Terre et en même temps faire n'importe quoi sur la Lune sous le prétexte qu'il n'y a personne, qu'on va faire de l'argent et que les autres le font, ça n'a pas de sens). 

Il y aura probablement des Français qui marcheront sur la Lune au cours des missions Artémis et ensuite des missions russes et chinoises, et ce sera très bien pour la science et pour la France. Mais la France ne doit pas prendre part au saccage commercial qui s'annonce car c'est une hérésie totale.

Encore une fois, tout est dans la différence entre exploration et exploitation. Pour la première, la France a largement les moyens de faire de grandes choses et de participer, pour la seconde c'est un piège dans lequel la France devrait éviter à tous prix de tomber.    

Pour avoir sa place sur la Lune, j'ai bien peur que notre pays n'ait d'autre choix que de finir par signer à son tour les Accords Artémis mais espérons que les négociations avec les Américains permettront que l'on s'assure alors que ça ne concrétisera pas mes craintes. 


Voilà, je pense avoir le tour de ce que j'avais à dire. N'hésitez pas à me dire en commentaires ce que vous pensez du discours de Malcolm ou de ce que j'ai dit 😉 ! 


* Comme à chaque fois, je remets TOUS les noms des astronautes qui ont marché sur la Lune pour une question de justice historique. 
  1. Neil Armstrong (1930-2012), Apollo 11 (juillet 1969)
  2. Edwin Aldrin (né en 1930), Apollo 11 (juillet 1969)
  3. Charles Conrad (1930-1999), Apollo 12 (novembre 1969)
  4. Alan Bean (1932-2018), Apollo 12 (novembre 1969)
    James Lovell
    (né en 1928), devait lors d'Apollo 13 (avril 1970)
    Fred Haise
    (né en 1933), devait lors d'Apollo 13 (avril 1970)
  5. Alan Shepard (1923-1998), Apollo 14 (janvier-février 1971)
  6. Edgar Mitchell (1930-2016), Apollo 14 (janvier-février 1971)
  7. David Scott (né en 1932), Apollo 15 (juillet-août 1971)
  8. James Irwin (1930-1991), Apollo 15 (juillet-août 1971)
  9. John Young (1930-2018), Apollo 16 (avril 1972)
  10. Charles Duke (né en 1935), Apollo 16 (avril 1972)
  11. Eugene Cernan (1934-2017), Apollo 17 (décembre 1972)
  12. Harrison Schmitt (né en 1935), Apollo 17 (décembre 1972)
Quelques autres astronautes devaient marcher eux-aussi sur la Lune au cours de quatre autres missions mais Apollo 13 ne put se poser sur la Lune à cause de son accident et les missions Apollo 18, Apollo 19 et Apollo 20 furent malheureusement annulées. 

Les Russes, quant à eux, ne parvinrent pas à aller sur la Lune du fait hélas de l'échec de leur lanceur N1 et de l'abandon de leur programme lunaire au milieu des années 1970. 

Dans quelques années, les Etats-Unis doivent retourner sur la Lune et de nouveaux astronautes auront l'immense privilège de marcher sur notre satellite. Et il n'y aura pas que des Américains seulement (ici), il y aura des partenaires internationaux, des Canadiens, des Japonais et des Européens (parmi lesquels on peut espérer voir Thomas Pesquet et Samantha Cristoforetti). Et ça ce n'est que pour le programme Artémis. Viendront ensuite les Russes et les Chinois, qui devraient être accompagnés eux aussi de partenaires. Puis plus tardivement, ce sera le tour des Indiens. 

Si une présence humaine permanente sur la Lune parait difficile à envisager sérieusement (en plus de la question de l'intérêt de la chose parce qu'entre explorer ponctuellement, par vagues de quelques missions, et s'installer durablement, ce n'est pas tout à fait la même chose ni les mêmes moyens), d'ici vingt ans le nombre d'humains ayant marché sur la Lune devrait avoir bien augmenté, au point que même moi je n'arriverais peut-être plus à retenir tous les noms 😄 ! 

Commentaires

  1. Il fait une généralité mais quand on lit Malcolm, voir Crichton, on comprend qu'il attaque surtout les leaders de la science.

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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    1. Derrière ces mots de Malcom, il y a une astuce qui fait en grande partie la richesse de MC. C'est cette capacité à cerner un sujet, quitte à provoquer ou vulgariser, lui donner de l'exotisme, il en vient toujours à l'essentiel, et c'est pour cela que ça parle à tant de monde.

      Je ne dirais pas que c'est vrai ou faux, je ne pense pas qu'il ait voulu par là révéler quelque chose au grand public ou tomber dans une sorte de populisme des familles, je pense que comme bien d'autres de ses propos, il cherche avant tout à inviter à la réflexion. Et c'est pour cela que ça titille...

      En réalité qu'est ce qu'un scientifique, sinon quelqu'un qui s'approprie ou qui souhaite s'approprier des connaissances quand d'autres s'approprient des terrains, des actions, des maisons etc...

      Il voudrait posséder le "savoir", le faire sien. Il voudrait qu'il soit véritable, authentique, que nul ne doute de sa valeur. Si bien qu'il classe volontiers ce qui se trouve au-dedans et au-dehors.

      Ce que MC fait, c'est une simple abstraction de la nature du savoir pour questionner sur la nature humaine, bien plus déterminante et implacable que tout qui est de la volonté...

      Il en est un excellent passage dans Westworld dans le discours d'Anthony Hopkins, quand il est face à la peinture de Michael Ange et qu'il explique que malgré tout le génie dont peut faire preuve les humains, le mobile ultime restera a jamais enchaîné à notre nature biologique, conditionné par l'impasse de notre finitude.

      Se reproduire, prier, léguer des connaissances, se barricader de mauvaise foi, tout cela ne sont que des tentatives illusoires qui visent au fond à dépasser les limites, même spirituellement, y compris pour un scientifique, que notre finitude nous fixe.

      A travers cette "éjaculation" lunaire, Crichton convoque à la fois l'évolution et la morale. Il parle certes des finalités, mais je pense qu'en bon Hegelien, il vise surtout à exposer la dialectique humaine. Mais par dessus tout surtout à lui restituer l'esprit scientifique, dont les disciples et les marchants se voient trop souvent comme des exaltés.

      Or pour eux non-plu point de salut. Concourir avec sa tête parce qu'on ne le peut avec ses bras, est une fuite autant que son contraire. Quelque soit la fiction que l'on partage, l'on s'efforcera toujours d'exercer dans les sentiers qui nous sont plus familiers. Et pour autant si une intrusion est possible dans tel ou tel autre domaine, pour peu qu'on s'y sente avantagé, rien sinon morale ne peut s'opposer.

      Par ailleurs, en ayant connu l'expérience d'une formation scientifique lui-même (et surtout au USA), MC a pu de ses yeux voir à la fois l'arrogance de ses enseignants et profondeur avec laquelle le monde de l'intérêt pénètre le milieu universitaire. Il aurait été difficile pour lui de manquer un parallèle aussi frontal que celui qu'il décrit entre le pouvoir du savoir et celui d'acheter... comme celui d'éjaculer dans l'espace...

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